Du nihil au « all in »
Primaëlle VERTENOEIL

Olivier Terwagne vient de faire paraître, aux éditions Traverse, un recueil de poésie intituléSoleils sur le Nihil. De la trentaine de poèmes qui compose ledit recueil se détache un art poétique particulier, dont on peut aisément trouver quelques filiations dans l’histoire de la poésie belge.

C’est que le jeune poète – il est né en 1983 à Chimay – joue avec les mots avec une étonnante facilité : « table zéro / degré zéro de l’humour/ Plats surgelés blagues réchauffés /Tu connais la dernière /C’est l’histoire d’une blonde / À la fin on s’est tous dit qu’elle est conne / Les gens s’amusent autant / Que lors d’un enterrement ». Ces quelques vers ne sont pas sans rappeler – mais là aussi la comparaison est facile –  la poésie de Jean-Pierre Verheggen. Bien qu’il faille préciser qu’entre ces jeux de mots, ces rimes faciles, et ces maintes références culturelles, les mots de Terwagne disent parfois plus que ce qu’ils veulent bien signifier au premier abord. En effet, à le relire plus attentivement, le texte gagne en intensité et en sens. Intrigué par le temps qui nous entoure, le jeune poète interroge le monde, de Byzance à Barcelone ; de Spirou à Ève et Adam : « À Barcelone, y a des quartiers notoires / La carte hélas n’est pas le territoire / Et dans le monde on devient qui on sert / Ouvert aux blessures des frontières. » Il en ressort une mise en scène de notre époque originale que la langue embellit, dans un subtil équilibre entre poésie lyrique et écriture sarcastique.

Les quelques références littéraires qui parsèment ici et là le recueil confirment également que Olivier Terwagne connait la poésie et la littérature d’aujourd’hui. Ce faisant, il propose avec son ouvrage Soleils sur le Nihil un recueil tout à fait cohérent, efficace et particulièrement dense. C’est peut-être là le seul vrai bémol du texte.  On aurait peut-être apprécié plus de retenue, par endroit, dans le propos. Le poète exploite avec trop de facilités les jeux de langages, parfois au détriment d’une vraie réflexion poétique sur le sens du poème. Mais ce n’est qu’un bémol, le poète est encore jeune et sa poésie ne peut qu’évoluer, déjà bien construite par une bonne connaissance du sujet.

Olivier TERWAGNESoleils sur le Nihil, Bruxelles, Traverse, coll. « Carambole », 92 p., 10 €